Souveraineté numérique : pourquoi le sujet devient incontournable et pourquoi il concerne désormais toutes les organisations
Arthur Chédeville
Arthur Chédeville
RédacteurCyberMarché
CyberMarché
Décryptage & Méthodo

Souveraineté numérique : pourquoi le sujet devient incontournable et pourquoi il concerne désormais toutes les organisations

Pendant longtemps, la souveraineté numérique a été perçue comme un sujet réservé à l'État, aux ministères et aux grandes administrations. Une thématique presque théorique, évoquée principalement dans les rapports publics ou les discours institutionnels. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. La souveraineté touche directement les entreprises, les collectivités, les établissements publics, les opérateurs essentiels et, plus largement, l'ensemble des citoyens.

La raison est simple : notre dépendance au numérique est devenue totale. Et cette dépendance repose, dans l'immense majorité des cas, sur des technologies, des infrastructures cloud, des plateformes et des outils qui ne sont pas maîtrisés localement. On ne se demande donc plus s'il faut s'y intéresser, mais plutôt comment continuer à fonctionner sereinement quand les briques critiques de notre quotidien échappent en partie à notre contrôle.

Comprendre de quoi on parle réellement

La souveraineté numérique n'est pas une idée abstraite ou un réflexe de protectionnisme. C'est la capacité, pour une organisation publique ou privée, de garder la main sur ses systèmes, ses données, ses infrastructures et les règles qui les encadrent.

Cela ne se résume pas à l'endroit où les données sont stockées, même si c'est un élément important. La souveraineté englobe également la manière dont les systèmes sont administrés, l'identité de ceux qui détiennent le code, les personnes qui peuvent accéder aux données, les lois auxquelles les fournisseurs sont soumis et l'impact que peuvent avoir des changements géopolitiques ou commerciaux rapides.

Autrement dit, être souverain, c'est être capable de maîtriser ses dépendances, ses risques et son périmètre décisionnel.

Pourquoi la cybersécurité se retrouve au centre du sujet

On parle beaucoup de souveraineté numérique dans un sens large, mais la composante la plus décisive aujourd'hui est la cybersécurité. C'est elle qui conditionne la fiabilité de toutes les autres couches.

Une organisation peut disposer d'une stratégie cloud ambitieuse ou de projets d'intelligence artificielle avancés. Si la sécurité n'est pas maîtrisée et alignée avec les besoins réels du territoire ou de l'entreprise, l'autonomie n'est que partielle. La cybersécurité est la couche protectrice qui garantit la confidentialité des données, la continuité des services essentiels, la résilience des infrastructures et la protection des secrets industriels.

Les politiques publiques évoluent d'ailleurs très rapidement. On observe une volonté claire de soutenir l'écosystème français, de renforcer les référentiels de sécurité, d'encourager l'usage de solutions locales, de structurer des certifications et d'améliorer la transparence. L'objectif n'est pas de restreindre l'écosystème, mais de s'assurer que les briques critiques sur lesquelles repose la vie économique soient réellement maîtrisées.

Les risques concrets liés à la dépendance technologique

Confier ses données ou ses systèmes à un fournisseur étranger ne consiste pas seulement à externaliser de l'informatique. Cela revient aussi à céder une part de sa capacité d'action. Cette dépendance crée des risques très concrets.

Le premier est d'ordre juridique. Certaines lois extraterritoriales permettent à des autorités étrangères d'obtenir des informations détenues par des entreprises présentes sur leur territoire, y compris lorsque ces informations concernent des organisations françaises.

Le deuxième est stratégique. Lorsque quelques acteurs dominent massivement les usages, une faille ou un incident peut provoquer des effets systémiques.

Le troisième est opérationnel. Un changement contractuel, une hausse tarifaire, le rachat d'un éditeur ou une évolution unilatérale du modèle économique peuvent fragiliser une organisation du jour au lendemain.

Dans un contexte marqué par l'instabilité géopolitique, la multiplication des attaques et la dépendance croissante aux grandes infrastructures cloud, ces risques deviennent impossibles à ignorer.

Le tournant français et européen

Face à ces enjeux, la France et l'Europe ont engagé une transformation profonde. Les certifications locales se développent, une doctrine du cloud de confiance s'affirme, un cadre européen commun est en cours de construction et des investissements publics soutiennent les acteurs du territoire.

L'ambition est claire : permettre aux organisations de s'appuyer sur des solutions robustes, transparentes, auditées et conformes aux exigences européennes.

L'objectif n'est pas d'opposer organisations européennes et entreprises internationales. Il s'agit plutôt de créer un socle technique et juridique fiable, sur lequel les organisations peuvent bâtir durablement.

Pourquoi les entreprises ont intérêt à s'engager dans cette voie

Pour les organisations françaises, qu'elles soient petites, moyennes, intermédiaires, publiques ou essentielles, la souveraineté numérique n'est pas un sujet idéologique. C'est un sujet de continuité, de maîtrise et de confiance.

S'appuyer sur des solutions souveraines permet de réduire l'exposition aux lois extraterritoriales, de mieux comprendre la chaîne de traitement des données et de s'assurer que le support, les opérations et les processus sont alignés avec les exigences locales. C'est aussi un moyen de soutenir un écosystème français qui a fortement progressé. De nombreuses solutions locales rivalisent aujourd'hui avec leurs équivalents internationaux, tout en offrant transparence, qualité et proximité opérationnelle.

La souveraineté n'a d'intérêt que si les solutions sont performantes. Et l'écosystème français montre désormais qu'il est capable de concilier performance, innovation et exigences de maîtrise.

Le rôle de CyberMarché : rendre cet écosystème visible, lisible et accessible

L'une des difficultés majeures autour de la souveraineté est la visibilité. Beaucoup d'acteurs français innovent et proposent des solutions de qualité, mais ils restent difficiles à identifier ou à comparer. Les entreprises peinent souvent à comprendre ce qui existe réellement, dans quelle catégorie, avec quel niveau de maturité ou pour quels cas d'usage.

C'est précisément pour répondre à ce besoin que nous avons créé CyberMarché.

Notre ambition est de rendre l'écosystème français de cybersécurité plus lisible, plus structuré et plus accessible. Nous voulons permettre aux organisations d'identifier en quelques minutes les solutions françaises réellement adaptées à leurs besoins, non pas pour cocher une case souverainiste, mais pour faire un choix éclairé, pragmatique et aligné avec leurs contraintes opérationnelles.

Nous travaillons à valoriser les acteurs français, à faciliter les mises en relation, à clarifier les approches et à guider les organisations dans la définition de leurs besoins. La souveraineté devient utile lorsqu'elle devient compréhensible et exploitable.

Conclusion

La souveraineté numérique n'est ni un slogan ni une abstraction. C'est une condition de résilience dans un environnement où la dépendance technologique influence directement la sécurité, la conformité, l'innovation et la continuité des services.

Reprendre la maîtrise de ses données et de ses infrastructures est devenu un enjeu stratégique pour toutes les organisations. Ce mouvement n'a de sens que si des solutions locales performantes et crédibles sont facilement accessibles.

C'est précisément l'ambition de CyberMarché : apporter de la clarté, aider les organisations à comprendre leurs options et contribuer à un numérique plus autonome, plus sûr et mieux aligné avec les intérêts du territoire.

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Arthur Chédeville

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